bulletin de la Société Jules Verne
N°187 Décembre 2014
[ TABLE DES MATIÈRES
Page 1 LA RÉDACTION :
Éditorial
Page 2 LA RÉDACTION :
L’assemblée générale du 17 mai 2014 à Paris
Page 3 Norbert PERCEREAU et Volker DEHS :
L’état-civil de Michel Verne
Page 15 Jules VERNE :
Lettre à un correspondant inconnu (1881)
Page 16 Volker DEHS :
La famille Verne à la plage
Page 20 Anonyme :
Quelques faits divers 1897-1918
Page 21 Jean DEMERLIAC :
… et le cinématographe vint à Michel Verne (2e partie) avec une lettre inédite de Michel Verne
Page 50 LA RÉDACTION :
Une image pour un disparu (à propos de Marcel Verne)
Page 52 Volker DEHS :
La mort de Michel Verne (avec deux lettres inédites de Michel Verne fils à Raymond Ducrest de Villeneuve)
Page 57 Philippe BURGAUD :
« Quand j’étais Michel Strogoff »
Page 68 Laurence SUDRET :
Quand une nouvelle de Ray Bradbury n’est pas sans nous rappeler Jules Verne…
Page 75 Henri LEVANNEUR :
Une leçon de mise en abyme ou mirifique aventure de Tintin
Page 77
Tables des illustrations
Page 79
Table des matières des textes parus du n° 185 au n° 187
Page 1 LA RÉDACTION :
Éditorial
Page 2 LA RÉDACTION :
L’assemblée générale du 17 mai 2014 à Paris
Page 3 Norbert PERCEREAU et Volker DEHS :
L’état-civil de Michel Verne
Page 15 Jules VERNE :
Lettre à un correspondant inconnu (1881)
Page 16 Volker DEHS :
La famille Verne à la plage
Page 20 Anonyme :
Quelques faits divers 1897-1918
Page 21 Jean DEMERLIAC :
… et le cinématographe vint à Michel Verne (2e partie) avec une lettre inédite de Michel Verne
Page 50 LA RÉDACTION :
Une image pour un disparu (à propos de Marcel Verne)
Page 52 Volker DEHS :
La mort de Michel Verne (avec deux lettres inédites de Michel Verne fils à Raymond Ducrest de Villeneuve)
Page 57 Philippe BURGAUD :
« Quand j’étais Michel Strogoff »
Page 68 Laurence SUDRET :
Quand une nouvelle de Ray Bradbury n’est pas sans nous rappeler Jules Verne…
Page 75 Henri LEVANNEUR :
Une leçon de mise en abyme ou mirifique aventure de Tintin
Page 77
Tables des illustrations
Page 79
Table des matières des textes parus du n° 185 au n° 187
[ Éditorial
Le présent numéro complète le dossier sur Michel Verne (et sa famille) grâce à de nouveaux documents et informations dus aux patientes recherches de Norbert Percereau, Cécile Compère, Jean Demerliac et Volker Dehs. Jean-Pierre Albessard a fourni des documents inédits de sa collection tandis que les photographies proposées par Jean Verne permettent une approche visuelle et plus directe des personnes concernées. Que tous soient ici chaleureusement remerciés pour leurs apports respectifs.
Rappelons que la Société Jules Verne a fait restaurer en 1997 – grâce au dévouement de Philippe Burgaud et Raymond Perrussel – le seul film de Michel Verne qui semble avoir survécu : La Destinée de Jean Morénas (1916), film d’une durée d’environ 70 minutes. Quelques vidéocassettes de ce document historique (tirage limité à 100 exemplaires) sont toujours disponibles et peuvent être commandées au siège1.
Malgré la documentation rassemblée sur Michel et sa famille, des lacunes subsistent dans la biographie vernienne : nous savons trop peu de choses sur les deux filles d’Honorine, Suzanne Lefebvre et Valentine de la Rue de Francy. Nous ignorons même leurs dates de décès – bien qu’elles aient passé une grande partie, sinon la totalité de leur vie dans l’entourage immédiat de leurs parents ! Nous ne pouvons qu’encourager de futures recherches sur cette branche de la famille, que nous serions heureux par ailleurs de publier dans ces colonnes.
La deuxième partie de l’article de Jean Demerliac consacré aux films de Michel Verne ouvre en même temps le second thème principal de ce numéro : les adaptations cinématographiques de l’œuvre de Jules Verne, avec un article de Pilippe Burgaud sur Michel Strogoff et une analyse de Laurence Sudret portant sur une nouvelle de Ray Bradbury (et son adaptation au cinéma). Terminons joyeusement avec Henri Levanneur et les « mirifiques aventures » de Tintin.
Après ces derniers bulletins très spéciaux, notre prochain numéro proposera des textes sur des sujets plus variés.
La rédaction.
1Pour le prix et le port, s’adresser au siège.
[ Quand une nouvelle de Ray Bradbury n'est pas sans nous rappeler Jules Verne...
Par Laurence Sudret
« Jules Verne est mon père ! » Voici comment commençait un entretien entre Ray Bradbury (1920-2012) et Olivier Delcroix, reproduit dans le Figaro Littéraire en 20021. La phrase est lancée pour « l’essai technique d’enregistrement » mais est-ce un hasard si les premiers mots prononcés par le célèbre romancier de science-fiction et d’anticipation américain sont un hommage à notre écrivain français ? Serait-ce un moyen pour cet auteur connu dans le monde entier de faire plaisir au journaliste français qui vient l’interviewer ? Ce serait oublier un peu vite que Ray Bradbury a toujours reconnu et clamé son amour pour Jules Verne. Déjà en 1955, dans un article pour le New York Magazine, il imaginait une discussion entre l’écrivain français mort en 1905 et lui-même2. Cet hommage écrit pour le cinquantenaire de la mort de l’écrivain né à Nantes présentait un passage de relais entre les deux auteurs : « Interviewed 50 years after his death, Jules Verne offers a slogan for inventors and visionaries of the future.3»... Cette discussion est reprise en partie dans l’article publié par le New York Times4 en hommage à l’écrivain américain quelques jours après sa disparition. Or, c’est une lecture qui mérite l’attention de tous les verniens, car elle est pour le moins étonnante. Tout d’abord parce qu’on y découvre un Jules Verne devenu parfaitement anglophone après sa mort (pour l’anecdote), ensuite parce qu’on y trouve un intéressant hommage à l’auteur et surtout parce que l’entretien pose la question de la vie éternelle propre aux écrivains... L’écrivain français explique en effet à son héritier spiriuel qui s’étonne de le voir : « We dead have Time Machines, too. My books ; they still live, breathe and move. Through them I travel and know your 1955 as you know all the years of my life »5. Cette admiration n’est pas sans présenter un intérêt pour les lecteurs verniens : qui dit admiration, dit bien souvent imprégnation et influence... Et si Bradbury avait été influencé par Jules Verne...6?
Par hasard, je suis tombée il y a quelques temps sur une nouvelle que je ne connaissais pas. C’est bien par hasard en effet, car j’avais enfin pu voir un film de 1953, Le Monstre des temps perdus que je souhaitais voir depuis quelque temps et que j’avais pu trouver... Le titre (daté pour le moins) évoquait plus Arthur Conan Doyle et son Monde perdu que les romans de mon auteur favori mais en regardant le film dans sa version d’origine, je fus surprise par le titre anglais : The Beast from 20,000 fathoms (littéralement La Bête de 20 000 brasses, ce dernier mot désignant une mesure maritime). Voilà qui me plongeait dans un univers plus vernien... d’autant plus que la première image du générique montrait un tourbillon aquatique, qui me fit penser immédiatement à un maelstrom (on ne se refait pas quand on est vernien...). Le générique assez curieux, montrait des images sous-marines et annonça au bout de quelques instants que le scénario de Lou Morheim et Fred Freiberger avait été suggéré par la nouvelle de Ray Bradbury, publiée dans le Saturday Evening Post7... La formulation est vague pour le moins et laisse entendre que l’adaptation a pris quelques libertés... Quoi qu’il en soit, je me promis alors de lire la nouvelle en question, pour satisfaire ma curiosité.
La lecture de la nouvelle fut une vraie surprise. D’abord parce que je ne la trouvais pas immédiatement puisqu’elle fut publiée pour la première fois dans l’édition mentionnée ci-dessus (le Saturday Evening Post) sous le même titre que celui du film, mais que ce titre avait été changé pour l’édition suivante. Ensuite parce que le lien avec le film est presque inexistant. Renseignements pris, il semblerait que les auteurs du film aient acheté les droits de l’histoire pour s’associer et apporter à leur film le bénéfice du nom de Bradbury déjà très en vogue. C’est sans doute pour cette raison que le titre fut changé par l’auteur à partir de sa deuxième publication et devint The Fog Horn (La Corne de brume).
Dans cette très belle nouvelle, Bradbury nous raconte comment un dinosaure s’approche tous les ans, au mois de novembre, d’un phare lançant régulièrement des coups de corne de brume ressemblant aux cris d’un animal solitaire de l’espèce disparue. Alors que deux gardiens sont présents un soir de novembre, il voit s’approcher l’être monstrueux et extraordinaire ; ils éteignent la corne de brume et l’animal, furieux, détruit le phare. Le monstre me sembla lors de ma première lecture tout droit sorti de l’imagination de Jules Verne... et en effet cette nouvelle, un très beau texte sur la solitude, nous donne vraiment le sentiment d’être un hommage à l’écrivain français même s’il n’est pas nommé. Pour commencer, le titre ne peut que nous faire penser aux 20 000 lieues sous les mers (le titre anglais étant une traduction littérale du titre français : 20,000 Leagues Under the Sea). En outre, à deux reprises, l’auteur commence les répliques d’un de ses personnages avec cette expression : « The mysteries of the sea » ; or on sait que le titre du livre écrit par Pierre Aronnax n’est autre que Les Mystères des grands fonds sous-marins (Mysteries of the Great Submarine Grounds). Certes ces détails ne suffisent pas du tout à nous faire faire le lien avec Jules Verne de façon catégorique... La suite nous amène néanmoins à faire un rapprochement, selon moi indubitable, avec l’univers vernien.
En effet, elle nous plonge dans le Voyage au centre dans la Terre lorsque le gardien du phare annonce, un peu à la manière de Lidenbrock, à son compagnon incrédule qui répète que l’existence de ce monstre est « impossible » : « we’re impossible. It’s like it always was ten million years ago. It hasn’t changed. It’s us and the land that’ve changed, become impossible. Us ! »8. Ainsi, comme les trois voyageurs partis explorer les mondes souterrains, le héros de la nouvelle annonce que c’est l’homme qui n’a pas sa place face à ce monde sous-marin. Les changements qui ont eu lieu à la surface de la Terre, n’ont en effet pas modifié les mondes cachés, protégés par la surface des eaux, comme la croûte terrestre avait protégé le monde que découvrirent Lidenbrock, Axel et Hans.
Cette atmosphère vernienne se retrouve également dans les considérations sur le temps qui passe, menées par l’un des gardiens. Alors qu’ils observent le monstre, Mc Dunn dit à son compagnon : « I saw it all, I knew it all-the million years of waiting alone, for someone to come back who never came back. The million years of isolation at the bottom of the sea, the insanity of time there, while the skies cleared of reptile-birds, the swamps fried on the continental lands, the sloths and sabre-tooths had there day and sank in tar pits, and men ran like white ants upon the hills. »9. Or cette remontée dans le temps ne peut que nous faire penser au rêve d’Axel, alors qu’il remonte le temps dans le chapitre XXXII ; ce rêve il le fait « tout éveillé » et c’est un peu ce qu’éprouve le personnage de la nouvelle de Bradbury. Il remonte le temps, pour ensuite revenir au présent après avoir traversé des millions d’années en compagnie du monstre...
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